Celles pour qui l’on pleure et prend les armes

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Celles pour qui l’on pleure et prend les armes

Noir. Lumière. Le rideau se lève. Les percussions retentissent.

Le mouvement naît, s’étend, les bras se balancent et ondulent avec les hanches. Pause.

Les corps sont ancrés. Les regards fixes. Le début d’un chant. D’un cri. Mouvement. 

Sous le souffle des percussions, portée par les Ngomas, éclot la première voix. Le premier récit. 

La première douleur. Le premier témoignage. Et ainsi de suite. 

« La femme numéro une a été violée, prise de force. La voilà qui se prostitue pour joindre les deux bouts.

La femme numéro deux est dans la même situation que la numéro une, à un détail près ; 14 clients par jour pour à peine 10 dollars.

La femme numéro trois est en larmes. Fils ou bien frère, comment doit-elle appeler le fruit de ses entrailles ? 

La femme numéro quatre a tenté d’enterrer son enfant vivant. Infanticide. Il lui rappelle trop son passé, tout ce qu’elle a perdu, tout ce qu’on lui a pris.

La femme numéro cinq s’est enfuie de chez elle pour sauver l’enfant né de son viol. »

C’est ainsi que débute « LArmes », par ces cinq témoignages, ces cinq voix, ces cinq souffles. Mais il en existe d’autres des femmes. La femme numéro six… La femme numéro sept … La femme numéro huit…  Les victimes ne manquent pas. Elles sont légions. Certaines n’étaient même pas encore femmes lorsqu’elles ont été violées. Elles n’avaient même pas encore saigné. Certaines ont été forcées à commettre les pires atrocités. L’une d’elles aurait, dit-on, une arme sur la tempe, été obligé de manger son nouveau-né. Détruites, mutilées, humiliées. La peine et la souffrance que ressentent ces femmes sont immenses, profondes autant que ma colère. 

Et pourtant personne n’en parle, ou presque. Leurs cris résonnent un temps puis s’évanouissent, noyés par le coltan, le cobalt, le cuivre et tous ces minerais qui alimentent nos vies à nous, irriguent nos moyens de communication et dont on ne se soucie jamais vraiment de la provenance. Bof, tant que cela fonctionne. 

Noir. Lumière. Saut. Les corps et les coeurs bondissent. Épaule contre épaule.  Les deux dans·euse·eur·s sont face à face. Un temps. Chorégraphie simultanée. Paroles qui se confondent.

C’est un peu de leur sang à elles·eux qui coule dans nos vies. Nous sommes les premier·e·s bénéficiaires des horreurs qu’elles subissent, des consommat·rice·eur·s en bout de chaîne, rendu·e·s complices à notre insu des atrocités, de la souffrance et de la détresse des habitantes d’un pays, que beaucoup sont cependant incapables de situer sur une carte. Et pourtant, sur les flancs des collines de la République Démocratique du Congo se dessinent des cicatrices, ce sont des plaies encores boursouflées, hideuses, bien visibles qui symbolisent le tourment d’une population, de nombreuses femmes, de survivantes.

Ce sont de ces plaies, toujours à vif, dont parle « LArmes ». C’est le sort de ces femmes là que raconte « LArmes ».

Et ces larmes ce sont les leurs, celles de la femme numéro trois et de tant d’autres encore. 

Et ces larmes ce sont les nôtre car d’un côté, leur détresse nous affecte, et de l’autre, malgré nous, parce que nous sommes en bonne position pour jouir de ces minerais que l’on retrouve dans nos si précieux smartphones, nous avons notre part de responsabilité dans cette histoire. 

Mais que dire ? Que faire de cette responsabilité imposée, découverte brusquement ? 

L’embrasser. S’engager. C’est le choix que nous avons fait chez Loba. 

En effet, cette responsabilité je l’embrasse, nous l’embrassons à travers l’art, à travers « LArmes ». Parce que « LArmes » est un spectacle, c’est leurs cris mêlés au mien, au nôtre. Leur rage, ma rage, la vôtre, la nôtre. Parce « LArmes » est un débat et que je crois, nous croyons fermement que la solution aux atrocités d’hier sera individuelle et collective. 

Pleurer oui mais aussi combattre, toujours combattre. Elles en premier. Ce n’est pas pour rien que ces femmes sont appelées des survivantes. Elles combattent à leur manière, s’acharnent à continuer à vivre en dépit de ce qu’on leur a arraché : le droit de pouvoir jouir de leur propre corps, d’être les maîtresses de leurs destins. Et c’est parce qu’elles continuent à lutter en dépit de ce qui leur est arrivé, de ce qu’on leur a volé, qu’elles sont aussi admirables. 

Alors, pleurer pour elles oui mais aussi combattre pour elles, toujours combattre.

C’est pourquoi « LArmes » est notre lutte, notre engagement envers elles. Un message que l’on fait passer pour leur offrir la reconnaissance qu’elles méritent mais aussi pour qu’un jour, enfin, grâce à l’aide de chacun·e d’entre vous, toutes ces atrocités cessent.  

Car à travers « LArmes » nous avons pris notre décision. Pour vous mesdames, victimes, guerrières, survivantes, nous ne baisserons pas les armes. Nous donnerons notre sueur, notre rage, verserons des larmes mais combattrons de toute notre âme. 

 

La pièce touche à sa fin. Dernier sursaut. Lumière. Noir.

 

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