La puissance des mères : Pour un nouveau sujet révolutionnaire

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La puissance des mères : Pour un nouveau sujet révolutionnaire 

Fatima Ouassak

 

UN MOT SUR L’AUTRICE

 

Fatima Ouassak est politologue, consultante en politiques publiques, elle est connue pour son engagement au sein des quartiers populaires et en faveur des droits des enfants qu’elle défend avec une perspective antiraciste, écologique et féministe. Née en 1977 dans le Rif Marocain, elle est toute jeune quand sa famille immigre en France notamment à Lille où elle grandit et fait des études à l’Institut d’Etudes Politiques de la ville.  

Fatima Ouassak est engagée contre les inégalités sociales, elle lutte en investissant et en créant des espaces de mobilisations. Elle fonde le réseau classe/genre/race qui dénonce les discriminations subies par les femmes issues de l’immigration postcoloniale. En 2016, elle cofonde le premier syndicat de parents d’élèves “Le Front des Mères” à Bagnolet en Seine Saint-Denis où elle réside.

En 2020, dans son ouvrage “La puissance des mères – Pour un nouveau sujet révolutionnaire”,  Fatima Ouassak analyse la figure de la mère, comme réel sujet politique ayant une capacité d’agir en faveur d’un changement social.

LA PUISSANCE DES MÈRES 

Fatima Ouassak analyse un sentiment paradoxal pendant sa maternité. A savoir, d’un côté, un sentiment de vulnérabilité du fait des violences médicales liées à l’accouchement. En effet, elle décrit une infantilisation de sa personne concernant ses choix d’éducation, infligée par le corps médical, les médias ou encore l’école. Ces institutions sont décrites comme porteuses d’un regard culpabilisateur sur les mères. 

De l’autre, un sentiment de puissance lié à la maternité, nourri par l’amour qu’elle porte à ses enfants. Une conscience moteure pour les protéger et se battre pour eux·elles. C’est ce que l’autrice nomme la “puissance du dragon”, le dragon représentant la figure de la mère. 

Ainsi, dans son ouvrage, Fatima Ouassak nous fait part de son expérience de la maternité pour dénoncer les inégalités sociales perpétrées par l’institution scolaire. Ces inégalités sont systémiques et touchent majoritairement les enfants, les personnes précaires, racisées et habitant·e·s des quartiers populaires. Il nous est montré tout au long de la lecture, comment à la fois ces violences discriminantes sont sexistes, classistes, racistes et se matérialisent dans le quotidien des personnes concernées notamment à travers leur rapport au territoire, en l’occurrence, Bagnolet. 

Cet essai a pour qualité de mettre en lumière les luttes menées par les femmes issues de l’immigration post-coloniale et de discuter des combats des mères dans une perspective féministe. 

 

SUR LE LIVRE

Les luttes des mères :  des luttes féministes, écologiques et antiracistes

 

Les mères sont des sujets politiques

Selon l’autrice, il ne s’agit pas d’essentialiser les femmes en les assignant au seul statut de mère mais de rendre visible leurs actions, en y reconnaissant une valeur politique. En effet, Fatima Ouassak en tant que féministe, admet que la charge de l’éducation, du soin des enfants incombe aux femmes du fait d’une division sexuelle du travail, qui veut les cantonner strictement à la sphère domestique sans valorisation du travail effectué. Elle souligne que cette charge est particulièrement importante pour les femmes racisées de quartiers populaires qui sont pourvoyeuses de care , car elles n’ont pas les moyens de déléguer les activités domestiques et celles liées à leurs enfants et aux enfants des autres femmes souvent blanches de Catégorie-Socio-Professionnelle (CSP) supérieure, dont elles ont aussi la charge. En ce sens, les femmes de CSP +, sont en capacité de ne pas être réduites à leur rôle de mère. Ce qui n’est pas le cas de toutes les femmes. Il est porté une critique par l’autrice du féminisme français qui a tendance à ignorer la question de la maternité, de séparer “radicalement” les femmes et mères, femmes de la famille ainsi que la mère et l’enfant. Une dissociation qui n’est pas forcément pertinente pour les personnes issues de l’immigration post-coloniale, pour lesquelles le rôle des mères n’est pas toujours dévalorisé. 

Fatima Ouassak tient à bien contextualiser son propos, par puissance des mères, elle parle de réappropriation du pouvoir, d’une capacité d’agir. En permettant à toutes les femmes d’être libres de leurs choix. 

Mères organisées – L’histoire des Folles de la place Vendôme 

L’ouvrage adopte une approche socio-historique et permet de mentionner certaines luttes menées par des mères issues de quartiers populaires. En France, dans les années 80,  les exactions racistes de la police laissent des familles endeuillées. Ces massacres sont le reflet de la violence de l’histoire coloniale française. Les populations immigrées sont  assassinées et notamment les adolescent·e·s et enfants. Fatima Ouassak nous explique comment ces dernier·ère·s sont désenfantilisé·e·s et facilement tué·e·s. Comme Malika Yazid, tuée en 1973 à Fresnes à l’âge de 8 ans, à la suite d’un interrogatoire où elle a été torturée par un policier. La police ne sera pas inquiétée. Ou encore Fatima Bedar, adolescent·e·s, d’origine algérienne battue, noyée dans la Seine, le 17 octobre 1961 par la police encore…

Les violences sont récurrentes. Dans les années 80, des familles de victimes s’organisent, s’associent, se portent parties civiles,  afin que les crimes racistes cessent et que la police soit désarmée. Le 21 mars 1984, des mères se rassemblent place Vendôme (Paris) pour interpeller le personnel politique sur les violences policières, elles portent les photos de leurs enfants, et réclament justice. Ce mouvement d’occupation d’une place fait référence au mouvement antérieur des mères argentines, qui ont investi la place de Mai à Buenos Aires en contestation du régime militaire dictatorial de Jorge Videla en 1976. Ce régime a torturé, tué des opposant·e·s. Les mères des victimes se sont rapidement organisées en contestation en investissant la place devant le palais présidentiel afin de  demander justice pour leurs enfants. Ces dernières ont elles aussi été torturées et assassinées du fait de leur mobilisation. Elles sont qualifiées de folles par les militaires qui leur interdisait de rester immobiles lors de la manifestation, les obligeant à marcher pendant plusieurs heures sur la place. En 1978, la médiatisation de la coupe du monde de football en Argentine, permet de rendre visible la lutte des mères de la place de Mai, ce qui contraint le gouvernement à les laisser s’exprimer à l’international sur le sujet. C’est de cette manière que la mobilisation de Buenos Aires a pu inspirer des mères en France (Place Vendôme). 

C’est ainsi que Fatima Ouassak inscrit ses revendications. Elle souligne que les violences policières persistent, que les familles issues de l’immigration post-coloniale continuent de s’organiser de se battre pour une meilleure justice sociale, ce qui passe par la prise en considération de diverses problématiques. 

 

L’écologie n’appartient pas aux bourgeois·e·s blanc·he·s 

Le point de départ de cet ouvrage, est celui de la lutte d’une mère – Fatima Ouassak – pour une meilleure alimentation à la cantine, en proposant la mise en place d’une alternative végétarienne pour les enfants. S’ensuit ce qu’elle nomme “une guerre avec l’école”. Les associations de parents comme la FCPE y voient une revendication communautaire et anti-laïque, alors que l’alternative végétarienne est proposée dans d’autres villes. L’autrice souligne que pour ses interlocteur·rices, il était inimaginable qu’une femme racisée ait des considérations végétariennes, qui seraient socialement valorisées si portées par une personne blanche de CSP supérieure. Les oppositions qu’elle connaît sont les résultats d’une stigmatisation historique des mères des quartiers populaires, notamment racisée à qui on veut retirer toute subjectivité politique.

C’est de cette manière qu’elle co-fonde en 2016 le syndicat le Front des Mères pour garantir une meilleure représentation des parents des quartiers populaires et déconstruire le stéréotype selon lequel, les familiers de ces villes et quartiers plus défavorisés, n’ont aucune conscience des enjeux touchant à leur environnement et ceux qui en découlent, comme l’alimentation des enfants. Ainsi, il est mis en place des activités, comme des piques niques végétariens, des ateliers de cuisine, des actions comme des sit-in pour l’entretien des ascenseurs en panne, des balades dans des parcs ou encore des partenariats avec des organisations comme Greenpeace. 

La nécessité de se réapproprier l’espace public 

Fatima Ouassak pose un constat très concret, celui de l’assignation à résidence des personnes vivant dans les quartiers populaires. En effet, il y une privation de l’espace public qui se manifeste de plusieurs façons. D’abord par des politiques de contrôle de ces territoires par les forces de l’ordre. Il y a une croissance des caméras de surveillance dans les cités ainsi qu’une présence physique accrue des agents de police. Cette présence met le territoire et les populations sous contrôle judiciaire et laisse voir des victimes de celle-ci. En effet, les contrôles de police sont nombreux, Fatima Ouassak rappelle que selon le défenseur des droits, les hommes issus de l’immigration ont 20 fois plus de chances d’être contrôlés, ce qui se termine souvent par des violences policières qui touchent les enfants et adolescent·e·s. Il y a donc une peur pour les parents de permettre aux enfants de sortir et donc d’investir l’espace public. De plus, les familles subissent le mauvais entretien de leur immeuble par les bailleurs, qui ne réparent pas les pannes d’ascenseurs. Ceci a pour conséquence de confiner les familles et notamment les enfants à l’intérieur des logements souvent devant les écrans. L’espace urbain du quartier populaire est illustré comme un lieu cloisonné par l’autrice. Elle montre que les habitant·e·s ont peu accès à l’espace. Ici réside alors tout l’enjeu politique, c’est-à-dire se réapproprier l’espace public en se mobilisant collectivement.  

Cette proposition de réappropriation passe par l’investissement de l’école publique par les familles des quartiers. En effet, il y a un processus de privatisation de l’enseignement, ce qui fait que les familles CSP + comme moins favorisées tentent d’éviter l’école de secteur dans les “zones prioritaires”. En effet, les moyens humains et matériels y sont moindres, les programmes scolaires sont peu ambitieux, les enseignant·e·s ne sont pas remplacé·e·s, ce qui crée un retard scolaire important pour les élèves. Fatima Ouassak, rappelle que cette privatisation de l’enseignement, ne fait que reproduire les inégalités, c’est-à-dire que même si les CSP modestes investissent les écoles privées, il y aura toujours une dévalorisation de ces nouveaux établissements privés par rapport à d’autres écoles privées mieux classées. 

Il y a la proposition de l’autrice de ne pas lâcher l’école de secteur, de s’en saisir, afin de proposer un réel lieu d’émancipation pour tous les enfants. 

L’enjeu de la transmission

La transmission est proposée ici comme un projet pédagogique et révolutionnaire. Ainsi, transmettre aux enfants, leur culture, langue, religion, des connaissances culinaires ou autres, leur permet de s’ancrer dans une histoire qui doit être vue comme une ressource. Une ressource affective et politique essentielle en matière d’éducation pour les minorités. C’est un moyen de lutter contre le système car tous ces attraits culturels sont dévalorisés si ce n’est criminalisé dans certains cas. Il faut donc en être fière, rendre fière l’enfant de son héritage notamment à l’aide de l’art ou encore des contes. Fatima Ouassak partage l’importance d’expliquer aux enfants tout cela afin qu’iel développe leur confiance en soi. Si un·e enfant à conscience de son histoire, il est plus à même de comprendre qu’iel n’est pas le·a seul·e à subir des discriminations et que des luttes existent et ont existé. Il faut soutenir l’enfant dans la découverte des discriminations, le cas contraire peut avoir un impact sur sa santé, mentionne une étude (que partage l’autrice) qui révèle que des 2, 3 ans une personne est consciente des injustices qu’iels subissent.  A travers son livre Fatima Ouassak et totalement dans une démarche de transmission par sa documentation détaillée d’évènements historiques touchant à l’histoire des populations immigrées, et des femmes notamment. 

Fatima Ouassak invite à ce que les enfants embrassent leur identité multiple en perpétuel mouvement. Ainsi d’être viligeant·e aux accusations de culturalisme, une forme de racisme qui soutient que les personnes minoritaires sont influencées majoritairement par leur culture. Ce postulat est totalement déshumanisant car il homogénéise les expériences vécues. 

 

Amandine LEGLISE

 

 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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